Un nombre sans précédent de naines brunes découvertes

Les naines brunes, des objets mystérieux à la frontière entre les étoiles et les planètes, sont d’une importance cruciale pour mieux comprendre à la fois les populations stellaires et planétaires. Cependant, en presque trois décennies de recherche, seules 40 naines brunes ont pu être observées directement autour d'étoiles. Une équipe internationale dirigée par des chercheuses de l’Open University et de l’Université de Berne a obtenu des images de quatre nouvelles naines brunes grâce à une nouvelle méthode de recherche innovante.

Les naines brunes sont des objets astronomiques mystérieux qui se situent entre les planètes les plus massives et les étoiles les plus légères, avec un mélange de caractéristiques stellaires et planétaires. En raison de cette nature hybride, ces objets énigmatiques sont essentiels pour notre compréhension à la fois des étoiles et des planètes géantes. Les naines brunes qui sont en orbite autour d’une étoile mère depuis une distance suffisamment large sont particulièrement précieuses car elles peuvent être photographiées directement, contrairement aux naines brunes qui sont trop proches de leur étoile et sont donc masquées par la luminosité de leur hôte. Cela offre aux scientifiques une opportunité unique d’étudier les détails des atmosphères froides, semblables à celles des planètes, de compagnons naines brunes. 

Cependant, malgré des efforts remarquables dans le développement de nouvelles technologies d’observation et de traitement d’images, les découvertes directes de naines brunes en orbite autour d’étoiles restent rares : en presque trois décennies de recherche, seules environ 40 naines brunes ont pu être imagées directement. Des chercheuses et chercheurs dirigés par Mariangela Bonavita de l’Open University et Clémence Fontanive du Center for Space and Habitability (CSH) et du Pôle de recherche national (PRN) PlanetS de l’Université de Berne ont réussi à obtenir des images directes de quatre nouvelles naines brunes, comme ils le rapportent dans une étude qui vient d’être publiée dans la revue Monthly Notices of the Royal Astronomical Society MNRAS. C’est la première fois que plusieurs nouveaux systèmes contenant des compagnons naines brunes sur de très larges orbites sont découverts simultanément.

Une méthode de recherche innovante

« Les naines brunes sur des orbites lointaines autour d’une étoile sont tout d’abord rares, et leur détection directe représente un grand défi technique, car les étoiles hôtes éblouissent totalement nos télescopes par leur luminosité », explique Mariangela Bonavita. La plupart des observations effectuées jusqu’à présent ciblaient aveuglément des étoiles aléatoires dans de jeunes amas stellaires. « Une approche alternative pour augmenter le nombre de découvertes consiste à n’observer que les étoiles qui montrent des indices d’un objet supplémentaire dans leur système », explique Clémence Fontanive. Par exemple, la façon dont une étoile se déplace sous l’influence gravitationnelle d'un compagnon peut procurer une indication sur l'existence de ce compagnon, qu'il s'agisse d'une étoile, d'une planète ou de quelque chose entre les deux.

« Nous avons développé l’outil COPAINS qui permet de prédire les types de compagnons qui pourraient être responsables des anomalies observées dans les mouvements stellaires », poursuit Clémence Fontanive. En utilisant l’outil COPAINS, l’équipe de recherche a sélectionné 25 étoiles proches qui semblaient prometteuses pour la découverte directe de compagnons cachés de faible masse, à partir des données de la sonde spatiale Gaia de l’Agence Spatiale Européenne (ESA). En utilisant l’imageur de planètes SPHERE sur le Very Large Telescope au Chili, ils ont observé ces étoiles et ont découvert avec succès dix nouveaux compagnons avec des orbites allant de celle de Jupiter à celle de Pluton, dont cinq étoiles de faible masse, une naine blanche (un résidu stellaire de forte densité) et, remarquablement, quatre nouvelles naines brunes. 

Augmentation considérable du taux de détection

« Ces résultats augmentent considérablement le nombre de naines brunes connues en orbite autour d’étoiles depuis de grandes distances, avec une hausse conséquente du taux de détection par rapport à toutes les études d’imagerie réalisées jusqu’à présent », explique Mariangela Bonavita. Si pour le moment cette approche est principalement limitée aux signatures de compagnons naines brunes et stellaires, les futures phases de la mission Gaia étendront ces méthodes à des masses plus basses et permettront de découvrir de nouvelles exoplanètes géantes. Clémence Fontanive ajoute : « En plus d’avoir autant de nouvelles découvertes d’un coup, notre programme démontre également la puissance de ces stratégies de recherche. »

« Ce résultat n’a été possible que parce que nous étions convaincus que la combinaison d’équipements spatiaux et terrestres pour l’imagerie directe des exoplanètes rendait le tout plus grand que la somme de ses parties. Nous espérons que ce sera le début d’une nouvelle ère de synergie entre différents instruments et méthodes de détection », conclut Mariangela Bonavita.

Informations relatives à la publication : 

M. Bonavita, C. Fontanive, R. Gratton, K. Mužić, S. Desidera, D. Mesa, B. Biller, A. Scholz, A. Sozzetti, V. Squicciarini: Results from The COPAINS Pilot Survey: four new BDs and a high companion detection rate for accelerating stars, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, Volume 513, Issue 4, July 2022, Pages 5588–5605

DOI: 10.1093/mnras/stac1250
https://academic.oup.com/mnras/article/513/4/5588/6583003

À lire également l’interview avec Clémence Fontanive dans le magazine en ligne « uniaktuell » 
(en anglais) :

The advocate for puzzling astronomical objects

Brown dwarfs are puzzling astronomical objects that are heavier and hotter than planets, but lighter and colder than stars. A research team led by Clémence Fontanive from the University of Bern has recently directly imaged four new of these mysterious celestial bodies. In this interview, the astrophysicist explains why brown dwarfs are important to our understanding of stars and planets.

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Center for Space and Habitability (CSH)

La mission du Center for Space and Habitability (CSH) est de promouvoir le dialogue et l’interaction entre les différentes disciplines scientifiques qui s’intéressent à la formation, à la découverte et à la caractérisation d’autres mondes à l’intérieur et à l’extérieur du système solaire, à la recherche de la vie ailleurs dans l’univers et à ses implications pour les disciplines autres que les sciences naturelles. Parmi les membres, les personnes affiliées et les collaborateurs, on trouve des experts en astronomie, en astrophysique et en astrochimie, en sciences de l’atmosphère, du climat et des planètes, en géologie et en géophysique, en biochimie et en philosophie. Le CSH accueille les bourses CSH et Bernoulli, un programme destiné aux jeunes chercheurs dynamiques et talentueux du monde entier afin qu’ils mènent des recherches indépendantes. Il mène activement une série de programmes visant à stimuler la recherche interdisciplinaire au sein de l’Université de Berne, y compris la collaboration et le dialogue ouvert avec la médecine, la philosophie et la théologie. Le CSH a également un lien actif avec le Centre for Exoplanets & Habitability de l’Université de Warwick.

Plus d’informations :  https://www.csh.unibe.ch/

Recherche en astrophysique : parmi l’élite mondiale depuis le premier alunissage

Le 21 juillet 1969, Buzz Aldrin a été le deuxième homme à descendre du module lunaire, il a été le premier à déployer la voile à vent solaire bernoise et l’a plantée dans le sol lunaire, devant le drapeau américain. Le Solarwind Composition Experiment (SWC), planifié, construite et évalué par le Prof. Dr. Johannes Geiss et son équipe à l’institut de physique de l’Université de Berne, a été le premier moment fort de l’histoire de la recherche en astrophysique bernoise.

La recherche en astrophysique bernoise fait depuis lors partie de ce qui se fait de mieux au niveau mondial : l’Université de Berne participe régulièrement aux missions spatiales de grandes organisations spatiales comme l’ESA, la NASA ou la JAXA. Avec CHEOPS, l’Université de Berne se partage la responsabilité avec l’ESA pour toute la mission. En outre, les scientifiques bernois font partie de l’élite mondiale en ce qui concerne les modélisations et les simulations sur la naissance et au développement des planètes.

Le travail fructueux du département de recherche en astrophysique et planétologie (RAP) de l’Institut de physique de l’Université de Berne a été consolidé par la fondation d’un centre de compétences universitaire, le Center for Space and Habitability (CSH). Le Fonds national suisse a en outre accordé à l’Université de Berne le financement du Pôle de recherche national (PRN) PlanetS , qu’elle dirige avec l’Université de Genève.

A propos de l'Open University (OU)

L'Open University (OU) est la plus grande institution universitaire du Royaume-Uni et un leader mondial de l'enseignement à distance flexible. Depuis sa création en 1969, l'OU a enseigné à plus de 2,2 millions d'étudiant-e-s dans le monde et compte actuellement plus de 205 000 étudiant-e-s.

Soixante-dix pour cent des étudiant-e-s directement inscrit-e-s occupent un emploi à temps plein ou à temps partiel, et 75 entreprises du FTSE 100 (Financial Times Stock Exchange 100 Index) ont parrainé des membres de leur personnel pour qu'ils suivent des cours de l'OU.

Lors du dernier exercice d'évaluation de la recherche universitaire (Research Excellence Framework, 2021), plus des trois quarts (76 %) des recherches de l'OU ont été évaluées comme 4 ou 3 étoiles - les plus hautes notes disponibles, attribuées à des recherches qui sont à la pointe du monde ou excellentes au niveau international. L'engagement de l'OU en faveur de la recherche et de l'impact sociétal est également reconnu, 82 % de l'impact de sa recherche étant évalué comme étant de premier plan au niveau mondial ou excellent au niveau international.

Pour de plus amples informations, veuillez consulter le site de l'Open University : https://www.open.ac.uk/

09.06.2022